Les célébrations pascales invitent toujours à se pencher sur la frontière qui sépare l'enfer du paradis...même dans le monde matérialiste du capitalisme global et financier.

Le premier trimestre 2019 aura constitué le point bas du ralentissement et la fin des révisions de la croissance mondiale par les instituts et organes internationaux. Désormais, l’activité économique globale tangente le niveau de 3% pour les deux prochaines années.

La récession tant redoutée par les investisseurs en fin d’année dernière ne s’est pas produite. Elle a, par ailleurs, peu de probabilité de se produire d’ici la fin de l’année 2019. 2018 avait constitué une des plus violentes corrections depuis la crise de 2008. Si 2018 a ressemblé à l'enfer, 2019 a pris le doux visage d'un monde idyllique et paradisiaque.

Le CAC 40 dividendes réinvestis affiche une performance positive de 13,3% pour le premier trimestre 2019. A mi-avril, il avait même accéléré puisque la performance dépassait 18%. Dans une forme de résurrection soudaine et imprévisible, les actions européennes ont, avec une alacrité, plus que rattrapé leur retard lorsqu’on analyse les performances indicielles.

Les thématiques de croissance ont dominé les classements sur le premier trimestre en raison de la baisse des taux d’intérêt comme depuis maintenant une décennie (sauf en 2016).

Depuis la fin du mois de mars, le mouvement de taux s’est légèrement inversé et les prémices d’une rotation en faveur des thématiques value apparaissent notamment en faveur du secteur bancaire. L’opération Deutsche Bank/Commerzbank sera, à ce titre, riche d’enseignements sur l'appétit des investisseurs et les consignes des régulateurs sur l'opportunité d'une consolidation européenne plus large du secteur.

Autre résurrection ou réincarnation, la Grèce moderne comme Etat est en train de sortir de l'enfer économique au prix d'énormes efforts et d'atroces souffrances sociales endurées par son peuple. Le taux d'une obligation grecque a atteint un plus bas cette semaine depuis 2005 (légèrement supérieur à 3 % contre presque 30 % au plus fort de la crise).

Dans le mythe grec Orphée et Eurydice, Orphée va chercher son aimée dans les affres de l'enfer. Hadès, prince des ténèbres dans la mythologie hellène, accepte qu'il la ramène à la lumière dans le monde des vivants à la seule condition qu'il ne se retourne pas. Il en fera autrement malheureusement et perdra Eurydice pour toujours.

La Grèce, mais aussi l'ultra-capitalisme libéral, ne devra pas comme Orphée avoir la tentation de se retourner...vers leurs anciennes pratiques (opacité, dérive budgétaire) et leur ancien modèle (surendettement, finance complexe) au risque de nouveau de tout perdre lors d'une crise qui sera cette fois-ci mortifère.

Igor de Maack est gérant et porte-parole de DNCA.