Pour l’économiste Véronique Riches-Flores, la récession est à notre porte et les moyens de la contrer risquent de ne servir à rien.

De plus en plus d’observateurs craignent un ralentissement, voir une récession, vous-même vous êtes inquiète ?

Ce n’est pas qu’on va vers un ralentissement, on y est, avec une situation de récession industrielle au niveau mondial. En Allemagne, on a enregistré 3 trimestres consécutifs de contraction de l’activité, la situation est peu ou prou identique en Asie.

Avec une industrie en récession, le choc induit est trop fort pour ne pas impacter le reste de l’économie. Cela est devenu évident cet été avec les perspectives d’emploi dans les services qui sont en train de s’inverser.

La question est en fait de savoir jusqu’où peut aller le mouvement de récession et comment le juguler.

Sur un cycle économique normal, on assiste toujours à une phase de purge. C’est ce qui permet ensuite de réenclencher une phase de croissance économique franche. Mais nous sommes dans une situation en quelque sorte intermédiaire où depuis 10 ans nous n’avons pas ni croissance franche ni récession. Or, sans purge la baisse des taux d’intérêt aura un effet très réduit sur l’activité, car le cycle est très mature.

Justement, les politiques « non conventionnelles » mises en place avec la crise de 2008 n’ont-elles pas brouillé les cartes ?

Oui, c’est devenu une sorte de « new normal » auquel on s’est habitué. Les taux négatifs ont d’abord eu un effet positif en dopant l’activité, mais à terme ils induisent des comportements contrariants chez les acteurs économiques, notamment en faisant remonter l’épargne plutôt que la consommation.

C’est vrai que la FED est allée très loin. Mais c’est, entre autres, en raison du manque de volontarisme de la BCE ; et il faut bien le dire du manque d’audace des politiques qui n’ont ni la volonté de mettre en place de vraies politiques keynésiennes, ni de restructurer en profondeur. Du coup, les banques centrales sont seules à la manœuvre et font avec les moyens qui sont les leurs.

Véronique Riches-Flores, comment se fait-on une place lorsqu’on est une économiste indépendante ?

En apportant une vision nouvelle. J’ai une clientèle essentiellement composée de structures d’une certaine taille qui sont déjà outillées en interne mais à qui je sers un peu de poil à gratter. Je leur fais entendre une musique un peu différente qui n’est pas toujours dans le consensus. J’ai une approche transversale au contraire des équipes internes souvent très spécialisées, donc fragmentée, au détriment de la vision d’ensemble.