Fini l’image désuète du café pris sur le comptoir d’un vieux bar, le café est devenu une véritable tendance et s’est largement développé ces 20 dernières années. Si Starbucks a montré la voie, Restaurant Brands, Dunkin’ Brands, Keurig Dr. Pepper ou encore J.M. Smucker ont aussi surfé sur la vague aux États-Unis. En Europe, c’est bien évidemment Nespresso ou Nescafé de Nestlé qui décrochent la palme. Cette croissance phénoménale a cependant connu un coup d’arrêt net à cause du coronavirus et remet bien des certitudes en question. Synthèse et analyse.

 a. Les faits

Si on savait que la pandémie du nouveau coronavirus avait eu des effets négatifs sur de nombreux secteurs, on oubliait cependant que l’effet sur plusieurs matières premières agricoles avait été dévastateur. Parmi celles-ci, on peut notamment citer le café.

Selon un rapport de Charles Schwab, un excédent global de 3,5 millions de sacs de café (pesant en moyenne entre 45 et 70 kilos avec une moyenne de 60 kilos) est attendu en 2020-21, le Brésil prévoyant une récolte record après une baisse de rendement en 2019.

Les producteurs de café brésiliens qui craignent une faiblesse réelle continue sont incités à livrer de plus en plus de café à l'exportation, même à bas prix.

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Les attentes en matière de croissance de la demande, la seule variable positive qui avait soutenu les hausses de prix, ont été revues à la baisse à la lumière de la pandémie mondiale de coronavirus.

Des données récentes de l'Organisation internationale du café ont révélé que les exportations mondiales de café arabica s'élevaient à 82,75 millions de sacs en 2019, soit une augmentation de 6 % par rapport à 2018, et que la croissance devait se poursuivre en 2020 jusqu'à ce que le confinement tempère l'optimisme des analystes.

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Enfin, cerise sur le gâteau, ajoutant aux inquiétudes concernant un déséquilibre de l'offre, le real brésilien a chuté de 5 % au cours des dernières semaines par rapport au dollar américain.

Bref, les prix du café pourraient atteindre un plus bas de près de 15 ans.

b. Un effondrement des prix du café

Dans un contexte fondamentalement baissier, Reuters Commodity Desk prévoit une importante « vague de baisse » qui pourrait faire s’effondrer les prix du café à 0,6380 dollar la livre au cours du premier semestre 2021.

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Techniquement, le prix du café connaît une résistance à 1.0255 dollar, et une rupture au-delà de ce niveau pourrait alimenter le rebond vers les 1.08 dollar.

c. Pas de répercussion sur les consommateurs

On peut se demander pourquoi la baisse du prix de la livre de café ne se répercute par sur notre expresso du matin. Plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, en raison de la volatilité des cours, négociants et distributeurs tardent à répercuter la baisse dans les commerces.

Ensuite, il faut rappeler qu’en raison de la perte due à la torréfaction, le prix doit déjà être majoré de près de 20%. Comme il faut environ sept grammes de café pour une tasse standard, la valeur n'a baissé que de deux cents d’euro. Il faudrait une chute encore plus importante, représentant en bout de chaîne 4 cents d’euro, pour que les cafetiers répercutent la baisse.

Enfin, il faut rappeler ici que la plupart des restaurateurs (ou des groupements d’achat) achètent leur café en une seule fois. Les cafetiers disposent donc d'une marge réduite, car ils ont calqué l'achat de café sur leurs budgets.

d. Un marché en pleine croissance cependant

Trois régions se sont taillées la part du lion dans la croissance de la consommation mondiale de café au cours des 20 dernières années : l'Union européenne (UE), les États-Unis et le Brésil. Ensemble, ces trois régions consomment 50 % de café en plus par an qu'en 1998.

Cette croissance n'est pas due à un seul facteur, mais à une combinaison de plusieurs. Starbucks a transformé les Américains en une nation de buveurs de café. Alors que les sodas ont été mal vus pour leur teneur en sucre, le café est devenu le véhicule de choix pour obtenir la dose de caféine « nécessaire ».

Les jeunes générations ont également adopté en masse la culture du café. Entre 2008 et 2016, le nombre de jeunes de 18 à 24 ans qui consomment du café est passé de 34 % à 48 %. Sur la même période, la consommation quotidienne des 25-39 ans est passée de 51 % à 60 %.

Parallèlement, la classe moyenne mondiale s'est développée. Le Brésil en est un parfait exemple : sa consommation de café est celle qui a le plus augmenté - plus de 75% - au cours des 20 dernières années. Mais il n'est pas le seul.

En 1965, environ 27% du café mondial était consommé dans les économies émergentes ou productrices de café. En 2015, ce ratio avait grimpé jusqu'à 46% de la consommation mondiale de café. Le café est en train de devenir un produit de base de la classe moyenne dans le monde entier.

En « temps normal » et lorsque la demande reprendra, le marché devrait connaître une croissance annuelle de 10,6 % (CAGR 2020-2025). Le segment le plus important du marché est celui du café torréfié, avec un volume de marché de 266’704 millions de dollars initialement estimé pour 2020.

Enfin, les entreprises se sont rendus compte que les marges sur le café étaient nettement supérieures à d’autres produits puisqu’en « temps normal » une livre de café à 1.5 dollar peut être revendue torréfier et brassée à 50 dollars (doivent cependant être rajouter les charges inhérentes).

e. Les chiffres de la consommation

La consommation mondiale de café s’élevait en 2020 à près de 3,5 milliards de tasses par jour avec une production annuelle avoisinant les 10 millions de tonnes par an. C’est la matière première la plus échangée dans le monde après le pétrole. Le marché du café représente entre 10 et 15 milliards de dollars d’échanges internationaux. La demande de café s’articule en 3 axes : demande de produit brut : la fève de café ; demande de café pour la pâtisserie dans un but aromatique et enfin demande de café pour la fabrication d’autres biens consommables (sodas et médicaments).

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f. Arabica ou robusta ?

La majorité des grains de café les plus qualitatifs proviennent de l’Amérique latine et centrale. Ce café dit « Arabica » est coté en dollars par livre et requiert des coûts élevés pour sa culture. Ces coûts élevés de l’Arabica ont favorisé la demande de Robusta (côté en dollars par tonne), un grain de café moins couteux, soit 70% moins cher que les grains d’Arabica, mais qui ne représente que 30% de la production.

g. Quels sont les gros acteurs du marché du café ?

En octobre 2019, Starbucks était la plus grande chaîne de cafés aux États-Unis en nombre d'unités. La chaîne de café comptait environ 14’880 magasins dans son pays d'origine.

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En comparaison, son concurrent Dunkin' (anciennement connu sous le nom de Dunkin' Donuts) comptait environ 9’570 magasins.

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h. Synthèse

Si vous avez bu plus de café durant le confinement, cela n’a pas été le cas pour tout le monde. En effet, l’arrêt de la chaîne de production (et de la cueillette), la hausse des récoltes ainsi que la baisse de la demande a frappé de plein fouet ce secteur étant considéré comme « l’or noir » des matières premières agricoles. Lorsque le déconfinement sera total (ce qui laisse entendre que les restaurants et bars à café seront tous ouverts), il sera nécessaire de revisiter la thématique.

 

perialam

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