Qualifié de grand méchant capitaliste par certains ou « d’homme le plus détesté aux Etats-Unis » par d’autres, le patron de la biotech Turing Pharmaceuticals, encore inconnu la semaine dernière, a gagné « une popularité » sans précédent.

Il est vrai que l’augmentation de plus de 5.000% du prix du médicament acquis par sa société en août dernier n’est pas passée inaperçue (13,50$ initialement, 750$ aujourd’hui). Et pour cause, Hilary Clinton, candidate à l'investiture du Parti démocrate pour l'élection présidentielle américaine de 2016, s’est aussitôt emparée de la nouvelle sur tweeter : qualifiant l’affaire de « scandaleuse », elle affirme qu’elle « mettra un plan en place dès demain pour régler ces problèmes ».  

Une déclaration qui aura coûté 4,57% à l’indice Nasdaq Biotechnology et une perte de valeur boursière de plus de 15 milliards de dollars pour les biotech présentent dans cet indice. Les investisseurs craignent en effet que l’administration n’emboite le pas à la candidate et que les marges du secteur ne s’en ressentent.

Indice Nasdacq Biotechnology (données journalières)

 

L’affaire n’est pourtant pas nouvelle car de nombreux laboratoires ont eu recours à une hausse spectaculaire des prix de certains de leurs médicaments. Ils ont semble-t-il été moins gourmands que Turing Pharmaceuticals.

Au-delà de ces considérations financières, cette affaire remet au gout du jour la question de la réglementation des prix des traitements développés par les biotech américaines. Si Hilary Clinton suit fermement ce qu’elle a avancé, cette affaire risque de jeter un coup de froid sur l’Eldorado américain des biotechs. Et de ralentir (momentanément ?) l’engouement pour le secteur, voir l’article Biotech, la surenchère. Un analyste spécialiste du secteur estime, sous couvert d’anonymat, « les niveaux de valorisation importants, et pas toujours justifiés. Avec certains traitements critiques, les laboratoires disposent en quelque sorte d’un droit de tirage que les Etats seront de plus en plus désireux de cantonner dans les limites jugées plus raisonnables à l’instar ce que ce s’est produit sur certains marchés émergents comme l’Inde. Il est vrai que l’on va atteindre un virage dans la façon dont ces valeurs sont appréhendées ».

Cette affaire n’est pas sans rappeler celle du Sovaldi, traitement contre l’hépatite C qui a fait l’objet d’âpres négociations, et de débats virulents, avant que sa commercialisation ne soit autorisée dans l’Hexagone au prix de quelque 40.000 euros le traitement.

SL/FL