Le mode d’exercice d’une activité professionnelle a pour conséquence de scinder ou de fusionner le patrimoine de l’exploitant et de son « entreprise ».

Clairement, l’exercice en société (1) permet de scinder les patrimoines : la société ayant la personnalité morale, elle dispose de fonds propres. D’autre part, les dépenses doivent être nécessaires à l’activité de la structure pour pouvoir être intégrées en comptabilité.

En revanche, l’entrepreneur individuel ne bénéficie pas de ce cloisonnement. Conséquences, il n’existe qu’un patrimoine unique regroupant à la fois les biens propres de l’exploitant, les biens de l’entreprise et le cas échéant, les biens communs.

Les faits soumis à la Cour d’appel de Paris (2) sont les suivants : un cabinet de conseil fait l’objet d’un jugement d’ouverture de liquidation judiciaire. Le liquidateur tente d’étendre la procédure (3) au conjoint « in bonis » arguant du fait que certaines dépenses personnelles, assez importantes pour être soulignées, avaient été prises en charge par l’entreprise.

Rappelons que l’époux in bonis subit les conséquences de la procédure collectives, a fortiori lorsqu’il est marié sous le régime de la communauté ou lorsque ce dernier a contracté des engagements envers les créanciers de son conjoint.

In fine, l’objectif du liquidateur était de faire bénéficier le conjoint des « avantages » de la procédure collective, soit :

  • stopper toutes actions en paiement durant la procédure,
  • interdire la reprise des poursuites après la clôture de la procédure.

Mais, la Cour d’appel de Paris ne l’a pas entendu de cette oreille, les critères de la confusion des patrimoines faisant défaut (4).

Elle relève ainsi que toutes les dépenses supportées par l’entreprise ont été réintégrées fiscalement au résultat fiscal d’exploitation.

Ainsi, ni la carte bancaire de l’entreprise détenue par le conjoint, ni les dépenses personnelles payées par l’entreprise, dès lors qu’elles sont réintégrées fiscalement, ne sont de nature à justifier une confusion des patrimoines, de telle sorte que l’extension de la procédure au conjoint in bonis est injustifiée.

EF/FL

Voir aussi

  1. Sociétés de capitaux type SA, SCA, SCS, SAS et sociétés hybride de type SARL et EIRL sous condition d’établir une déclaration d’affectation.
  2. Cour d’Appel de Paris du 9-2-2016 n° 15/02067 
  3. Art L621-2 du code de commerce permettant l’extension d’une procédure collective à «  une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur » applicable également aux procédures de liquidation judiciaire (article L641-1).
  4. Conformément à la jurisprudence antérieure, la confusion des patrimoines est caractérisée par la confusion des comptes, des flux financiers anormaux, une volonté systématique des parties.