Et les interrogations des professionnels du secteur sont légitimes.

Ainsi, l’Assemblée nationale a voté en nouvelle lecture (1), l’amendement aux termes duquel le HCSF, présidé par Monsieur Sapin en personne, peut contraindre l’épargne des ménages français (2) afin d’éviter la faillite des compagnies d’assurance.

On évite le ton alarmiste et on se concentre sur une analyse de l’article, objet de la controverse :

Quand ? En cas de « menace grave et caractérisée » (soit, par exemple une hausse subite des taux provoquant un mouvement de rachat massif) pour la situation financière de l’ensemble (ou d’un sous ensemble) des acteurs de l’assurance (3), ou pour la stabilité du système monétaire financier.

Comment ? Le HCSF ne peut agir que sur proposition du gouverneur de la Banque de France, soit du président de l’ACPR et sur avis du collège de supervision de cette autorité.

Combien de temps ? A l’origine, la mesure était envisagée pour 6 mois. Le Sénat a réduit ce délai à 3 mois. Ce délai est renouvelable après consultation du CCLRF (Comité Consultatif de la Législation et de la Réglementation Financières). En l’espèce, il ne s’agit que d’une instance consultative. D’autre part, le renouvellement n’est pas limité dans le temps.

Lors des débats, Romain Colas, à l’initiative de l’amendement, n’omet pas de rappeler que l’ACPR a déjà la possibilité de prendre ce type de mesure pour un acteur en particulier (4).

Par conséquent, la véritable nouveauté tient plus au fait que la mesure s’applique à un ensemble d’acteurs. Le pouvoir conféré au gouvernement reste, in fine, encadré par l’ACPR.

En somme, on ne conteste pas le caractère inquiétant de ces dispositions, mais, gardons la tête froide : il s’agit d’une mesure exceptionnelle pour une situation exceptionnelle (5) qui n’est pas fonction des seuls desiderata du gouvernement.

Précisions enfin que ce texte doit encore être transmis au Sénat en 2de lecture, puis de nouveau à l’Assemblée nationale qui aura le dernier mot d’ici la fin de l’année.

EF/FL

Voir aussi

  1. Pour accéder à l’intégralité de l’article adopté en dernière lecture, cliquez ICI
  2. C’est-à-dire : « limiter temporairement l’exercice de certaines opérations ou activités, y compris l’acceptation de primes ou versements - Suspendre ou restreindre temporairement la libre disposition de tout ou partie des actifs - Suspendre, retarder ou limiter temporairement, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat »
  3. Les entreprises exerçant une activité d'assurance, de réassurance, les mutuelles, les unions mutualistes. Article L612-2 I B CMF de 1° à 5°
  4. Compte rendu intégral de la séance du 29 septembre 
  5. En France, un seul organisme (Europavie) a fait faillite au cours des 30 dernières années en raison d’une stratégie de placements qui s’est révélée trop risquée alors même que l’organisme avait garanti des taux de rendement élevés. Au japon, certaines compagnies d’assurance ont fait faillite dans les années 90 : la crise des assureurs-vie japonais est principalement liée à une surévaluation des taux garantis sur les contrats au regard du rendement de l’actif (Cf Analyse de l’ACPR : « Défaillances dans le secteur de l’assurance vie au Japon dans les décennies 1990 et 2000 »).