En cette période de hausse des taux d'intérêt, une approche plus fine est nécessaire pour générer de l'alpha tout en atténuant le risque dans le domaine du crédit aux entreprises. Josh Lohmeier, de Franklin Templeton Fixed Income, décrit un processus dynamique de construction de portefeuille qui s'adapte à différents types d'investisseurs et peut être reproduit dans divers environnements.
Principales conclusions :
- Dans le contexte actuel de taux d'intérêt plus élevés et plus longs, nous pensons que des techniques plus pointues sont nécessaires pour générer de l'alpha (rendement excédentaire d'un investissement par rapport au rendement de l'indice de référence) tout en renforçant la protection face aux fluctuations baissières.
- Au-delà de la sélection de titres bottom-up de titres, nous pensons qu'un processus quantitatif bien pensé de construction de portefeuille et d'allocation des risques est susceptible de dégager des rendements excédentaires cohérents et non corrélés par rapport à des groupes de pairs, ce qui peut profiter à des investisseurs bien diversifiés.
Biais de comportement et inefficiences des marchés
Dans le cadre typique de la recherche fondamentale bottom-up pour la sélection du crédit d'entreprise, il peut être difficile pour un analyste de recommander une obligation d'entreprise de qualité supérieure qui se négocie avec des écarts très serrés par rapport à son indice de référence ou à son groupe de pairs, car cette obligation ne surperformerait que si les obligations plus risquées enregistraient des résultats médiocres. Par ailleurs, les gestionnaires d'investissement sont enclins à un optimisme excessif quant à leur capacité à prévoir la performance des investissements, ce qui crée un biais en faveur des positions plus risquées sur le marché du crédit. Un tel biais comportemental se traduit par un risque potentiellement plus élevé pour le portefeuille par rapport à l'indice de référence, ou bêta. Un autre résultat potentiel est la récurrence de positions de portefeuille globalement longues (une tendance à rechercher un rendement supérieur à celui de l'indice de référence) et longues par rapport à l'indice de référence, ce qui expose les clients à une volatilité excessive des rendements tributaire de l'orientation des marchés. Par exemple, si une période de difficultés sur le marché et un sentiment de refus du risque prévalent, on peut s’attendre à voir le portefeuille sous-performer car il n'est pas neutre sur le plan du bêta et présente un risque supérieur à celui de son indice de référence.
Avant de nous pencher sur la dérivation de l'alpha à partir de la constitution d'un portefeuille, soulignons qu'en travaillant avec des gestionnaires actifs, les clients reconnaissent que les indices ou les marchés financiers sont intrinsèquement inefficaces. La valeur ajoutée de la gestion active consiste à dissocier l'univers du crédit en sous-ensembles pour tirer parti des inefficiences et tenter de générer de l'alpha supplémentaire, tout en intégrant mieux nos idées de recherche dans les portefeuilles et en produisant un meilleur résultat ajusté au risque sur une base régulière.
Regrouper l'éventail d’opportunités en fonction de la volatilité
Dans le secteur de la gestion d'actifs, les équipes de recherche sur le crédit aux entreprises sont généralement structurées selon des classifications sectorielles industrielles de type Bloomberg. Bien que l'équipe de crédit aux entreprises de qualité investment grade (IG) de Franklin Templeton soit elle aussi organisée de la sorte, nous ajoutons une dimension supplémentaire en demandant à nos analystes de classer les titres par ordre décroissant de qualité sur la base de leur vision prospective et de prévoir comment les écarts devraient se négocier les uns par rapport aux autres ; le débat qui en résulte permet d'identifier les obligations qui, selon nous, sont moins chères ou plus risquées par rapport à leurs homologues.
Les émetteurs d'un même secteur industriel ne sont pas tous similaires en termes de notation de crédit ou d'autres facteurs idiosyncrasiques, de sorte que les profils de risque diffèrent d'un émetteur à l'autre. Ainsi, un émetteur technologique de haute qualité noté A présente généralement des écarts serrés sur les obligations à long terme par rapport à l'indice, tandis que ceux d'un émetteur technologique noté BBB sont en règle générale plus importants que l'indice et très volatils. Par conséquent, les entreprises technologiques de premier ordre et celles de moindre qualité ont peu de points communs en termes de risque et de volatilité.
Afin de mieux répartir le risque dans un portefeuille, nous subdivisons l'univers sectoriel en trois catégories : bêta faible, moyen et élevé, sur la base de la volatilité historique des écarts. Le bêta faible peut être compris comme les entreprises de la plus haute qualité (par exemple, les émetteurs qui ont les écarts les moins marqués par rapport à l'indice ayant la volatilité la plus faible). Un exemple de bêta moyen serait les crédits de qualité supérieure et moins cycliques notés BBB, le bêta élevé correspondant généralement aux crédits de qualité inférieure BBB plus cycliques tels que les émetteurs de produits de base BBB. Nous pensons que cette approche permet un meilleur processus de construction de portefeuille, non seulement d'un point de vue bottom-up, mais aussi en isolant les secteurs et en séparant les parties les plus risquées des éléments de meilleure qualité pour mieux répartir les risques. En classant les émetteurs de qualité supérieure en fonction de ceux qui le sont moins, nous constatons qu'il est nécessaire de mieux calibrer le risque lié au bêta afin que l'ensemble des opportunités soit réellement compétitif par rapport au groupe de référence le plus approprié.
Placement stratégique de l'ensemble des opportunités sur la courbe de rendement
De manière générale, les gestionnaires de crédit cherchent à améliorer le rendement de leurs investissements en prenant un risque de duration supérieur à celui de l'indice de référence. Bien que cette stratégie fonctionne généralement à l'avantage des investisseurs lorsque les taux restent bas et que les écarts sont limités, elle les expose également à d'éventuelles pertes si les taux d'intérêt ou les conditions du marché évoluent à l'encontre de leurs positions. Alors que nous entrons dans un régime de taux d'intérêt plus élevés et plus longs, avec des prévisions de volatilité accrue des actifs à risque, nous pensons qu'il y a lieu de réexaminer la formule de la duration plus longue et du risque bêta plus élevé pour augmenter les rendements. Nous estimons que les mouvements de taux d'intérêt sont par nature imprévisibles. C'est pourquoi nous avons adopté une approche neutre en termes de duration, car nous considérons que la gestion de la duration est une source moins régulière d'alpha que la génération d'idées et la construction de portefeuilles.
La courbe de crédit reflétant les niveaux de rendement à différentes échéances, nous identifions ce que nous estimons être le point le plus efficace pour détenir le risque en prenant des positions sur les pentes de la courbe qui fourniront un rendement supplémentaire grâce au roll-down (technique selon laquelle un investisseur possédant une obligation la conserve pendant un certain temps afin que sa valeur augmente à mesure qu'elle se rapproche de l'échéance, car elle est évaluée à un rendement inférieur). Dans les cas où les courbes de crédit sont plates voire inversées, la détention d'un risque au-delà d'une certaine échéance ne donne lieu à aucune compensation supplémentaire en termes de spread, et nous éviterions de suivre cette piste. En bref, le placement de positions obligataires le long de la courbe de crédit peut être extrêmement bénéfique pour les rendements du portefeuille en raison des différentes formes de la courbe de crédit selon les secteurs et les notations.
Pour déterminer le positionnement maximal du roll-down sur la courbe de crédit, nous examinons également la position du point de portage optimal sur cette même courbe (c'est-à-dire celui où le rendement de la détention d'une obligation est optimal). En regroupant les crédits sur la base de leur profil de risque (comme décrit plus haut), nous sommes en mesure de mieux évaluer le potentiel de portage relatif au sein de ces différentes catégories de volatilité.
Vision globale
Nous pensons que notre méthode unique de constitution de portefeuille nous permet d'incorporer nos meilleures idées de sélection de titres individuels tout en permettant la neutralité du bêta par rapport à notre indice de référence grâce à la répartition des risques en fonction des niveaux de volatilité. La neutralité du bêta a notamment pour avantage de réduire l'influence de l'orientation du marché sur la génération d'alpha, surtout dans le contexte actuel où il est difficile de prévoir si les marchés vont réagir favorablement aux bonnes nouvelles.
Notre processus d'optimisation du portefeuille vise également la neutralité en termes de duration par rapport à notre indice de référence en utilisant un positionnement stratégique sur la courbe de rendement du crédit. Nous pensons que le portefeuille ainsi constitué isole et exploite les inefficiences structurelles de l'indice de référence tout en visant à offrir une protection contre les baisses dues à des conditions de marché défavorables.
Notre cadre de construction de portefeuille peut facilement s'adapter aux besoins d'un large éventail d'investisseurs, qu'il s'agisse de portefeuilles d'assurance « buy-and-hold » ou de stratégies actives à rotation plus élevée qui tirent parti des opportunités d'investissement dès qu'elles se présentent. Nous estimons disposer d'un processus de construction de portefeuille reproductible, avec des résultats positifs constants et moins corrélés à ceux de nos pairs. Nous pensons que nos clients ont tout autant besoin d'une diversification de leurs gestionnaires que de leurs obligataires.
Josh Lohmeier, CFA, Portfolio Manager, Investment Grade, Franklin Templeton Fixed Income, United States
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