Brexit, tensions commerciales sino-américaines, montée du populisme, risques de bulles, entreprises zombies les risques pesant sur l'économie mondiale et en particulier sur les PME proliféraient à la fin 2019.

Une étude menée par Euler Hermes et Bibby Financial estime alors que 56% des dirigeants de PME implantées dans 13 pays d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Asie déclarent être préoccupés par la conjoncture mondiale, soit 9 points de moins qu'en 2017.

Aujourd’hui le coronavirus pourrait avoir porté à plusieurs d’entres elles un coup d’arrêt fatal et largement remettre en question le rebond en V de l’économie. Synthèse et analyse. 

 a. Les faits

La Small Business Administration américaine a publié les premières données concernant son programme de protection des salaires de 650 milliards de dollars (PPP) destiné aux petites entreprises pendant la pandémie de coronavirus.

Les données montrent que les deux tiers des prêts accordés étaient d'un montant de 50’000 dollars ou moins, alors que le montant total des dollars prêtés dans cette plus petite tranche n'était que d'environ 57 milliards de dollars - un peu plus de 11 % du total de 521 milliards versés jusqu'au 30 juin.

Un autre 27% des prêts - soit 168 milliards de dollars - ont été versés par tranches de 50’000 à 350’000 dollars. Les prêts d'un million de dollars, bien que représentant moins de deux pour cent de tous les prêts, ont représenté 181 milliards de dollars.

On constate ainsi que ce sont les petites sociétés, dont (presque) personne ne parle qui sont les plus touchées par la pandémie.

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b. Les faillites c’est pour demain

La Maison Blanche et le Congrès ont fait du sauvetage des petites entreprises un élément clé du sauvetage financier. Ils ont même adopté un deuxième plan de relance pour elles à la fin du mois dernier.

Mais déjà, les économistes notent que plus de 100’000 petites entreprises ont fermé définitivement depuis l'escalade de la pandémie en mars, selon une étude réalisée par des chercheurs de l'université de l'Illinois, de la Harvard Business School, de l'université de Harvard et de l'université de Chicago (https://www.nber.org/papers/w26989.pdf).

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Leurs dernières données suggèrent qu'au moins 2 % des petites entreprises avaient déjà disparu à la mi-mai (derniers chiffres disponibles). Deux mois après, le chiffre est bien évidemment plus élevé. Le carnage a été encore plus important dans le secteur de la restauration, où 3 % des restaurateurs ont fait faillite, selon la National Restaurant Association. (https://www.abi.org/newsroom/press-releases/commercial-chapter-11- bankruptcies-increase-14-percent-in-the-first-quarter)

Certains propriétaires attendent encore aujourd’hui de savoir s'ils recevront une aide fédérale de relance avant de décider de se mettre sous la protection de la loi sur les faillites (le fameux Chapter 11 qui convient mieux aux grandes entreprises).

Les analystes avertissent que ce n'est que le début de la pire vague de faillites et de fermetures de petites entreprises depuis la Grande Dépression. Il n'est tout simplement pas possible pour les petites entreprises de survivre sans revenus pendant des semaines, voire des mois, puis de rouvrir à mi-capacité, selon de nombreux propriétaires.

Un sondage publié par la Chambre du Commerce américaine (US Chamber of Commerce), indique-lui que plus de 40% des 30 millions de petites entreprises du pays pourraient fermer définitivement dans les six prochains mois en raison de la pandémie de coronavirus.

• La date butoir

Comme on peut l’imaginer, la patience pour le non-paiement de certaines charges (loyers, téléphone, électricité …) ne durera pas éternellement. Les experts s'attendent à ce que le nombre de faillites d'entreprises augmente à la fin de l'été, après l'épuisement des prêts du programme de protection des salaires et la fin des prestations de chômage élargies (prévue pour le 31 juillet).

c. L’importance des petites entreprises

Alors que 4,2 millions d'entreprises ont reçu des prêts d'urgence de la Small Business Administration, cela ne représente qu'une fraction des 30 millions de petites entreprises du pays. De nombreux propriétaires de petites entreprises disent que le sauvetage financier du Congrès n'est pas bien conçu pour aider les très petites entreprises, appelées microentreprises, qui ont des frais généraux importants comme le loyer.

Rappelons ici que les petites entreprises doivent utiliser les trois quarts de l'argent du PPP sur la masse salariale pour que celui-ci devienne une subvention qui n'a pas à être remboursée. Le Congrès a conçu le programme PPP de cette manière pour aider à sauver des emplois, mais il pose des problèmes lorsque le loyer ou d'autres dépenses représentent une part plus importante des obligations d'une entreprise, par rapport à la masse salariale.

Dans les années 1980 et 1990, les petites entreprises employaient plus de la moitié des travailleurs américains. Si cette dynamique a changé au fil du temps, en 2017, il y avait tout de même 47 % des employés du secteur privé qui travaillaient dans des petites entreprises. La pandémie devrait encore réduire cette proportion.

Déjà en avril, les petites entreprises avaient connu beaucoup plus de licenciements que les grandes, selon l'entreprise de traitement des salaires ADP, un indicateur avancé important.

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d. Se réinventer va impacter l’emploi

Les études sur les petites entreprises constatent que près de 35 % des petites entreprises (tous secteurs confondus) ont déclaré qu'elles payaient un loyer réduit ou qu'elles retardaient le paiement. Alors que les propriétaires d'entreprises débattent de l'opportunité de prendre l'argent du PPP, de plus en plus d’entre eux choisissent plutôt de réinventer leur modèle d'entreprise, en se dirigeant de plus en plus vers un modèle de ventes en ligne en réduisant obligatoirement les coûts de personnel.

Pour ceux qui pensent que si une petite entreprise fait faillite aujourd’hui, une autre ouvrira demain (ou après la crise liée au coronavirus), ils devront se raviser. En effet, de plus en plus d’études conclues qu’il en résultera probablement un nouveau déplacement de l'équilibre des pouvoirs - et des emplois - vers les grandes entreprises qui ont de meilleures chances de survivre en empruntant de l'argent ou en puisant dans d'importantes réserves de liquidités.

Les mesures d'urgence prises par la Réserve fédérale, avec le soutien du Trésor, ont en effet permis aux grandes entreprises d'emprunter de l'argent presque gratuitement.

e. Synthèse

On oublie souvent que le cœur de l’économie n’est pas seulement les grandes entreprises (majors) mais bien les petites et moyennes. Ceci est vrai aux États-Unis, mais bien évidemment aussi en Europe et en Asie.

Dans le cas américain, la fin des aides gouvernementales va prendre fin sous peu ce qui signifie qu’un nombre non négligeable de PME va faire faillite ces prochains mois et largement impacter le taux de chômage américain. Par ricochet ce sont aussi les banques qui vont en souffrir en faisant face à des taux de défauts massifs.

 

perialam

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