Actions Fondamentales - L’analyse de Fabiana Fedeli : Je suis au courant de beaucoup de choses, vraiment. Peut-être pas assez, mais j’ai l’impression que c’est déjà trop. Chaque jour, on me bombarde de données, de commentaires et de prévisions sur tous les aspects de la conjoncture économique, les différents scénarios de vaccin contre le coronavirus, les sondages relatifs à l’élection américaine et même la probabilité qu’à un moment donné nous assisterons à la remontée tant attendue de l’inflation. Mais toutes ces informations sont-elles utiles pour décider comment allouer nos capitaux d’ici à la fin de l’année, et même à plus long terme ? Je ne crois pas.
 

Fabiana Fedeli RobecoDans ce déluge d’informations reçues en temps réel, notre priorité en tant qu’investisseurs est de déterminer quelles sont les données et les prévisions les plus utiles. C’est pourquoi, et comme toujours, nous devons maintenir notre cap, ce qui suppose de savoir quelle destination nous choisissons parmi les nombreuses qui s’offrent à nous. Savoir quelle trajectoire suivre pour y parvenir est tout aussi important : avoir un œil sur un potentiel retour de l’inflation à partir de 2022 semble facile à envisager mais cela ne m’aide pas dans ce que je veux faire de mon portefeuille maintenant, même en tant qu’investisseur à long terme.

Dans nos dernières perspectives trimestrielles, nous confirmions (par rapport aux précédentes) que les marchés actions des pays capables de relancer leur activité économique plus rapidement que les autres après la crise du coronavirus s’en sortiraient relativement mieux. L’Asie du Nord figurait en tête de notre liste (Chine, Taïwan et Corée du Sud), suivie de l’Europe. Nous écrivions également qu’un nouveau coup de pouce sur les marchés actions ne serait probablement pas aussi important qu’au deuxième trimestre, en particulier aux États-Unis. Nous pressentions une période de ralentissement et de possibles prises de bénéfices, et affirmions que la prochaine étape de la remontée des marchés devrait provenir des actions plus cycliques. Tout cela à condition d’avoir une meilleure visibilité sur la reprise économique, ce qui n’était pas évident à l’époque.

Toutes les conclusions de nos précédentes perspectives restent valables, sous réserve que certains événements se soient déjà produits. Le ralentissement a bien eu lieu, induit par le Nasdaq, et l’Asie du Nord a surperformé les indices S&P 500 et Nasdaq Composite en dollars américains, avec l’aide de certaines devises plus fortes. L’Europe est quant à elle parvenue à surperformer jusqu’à la première quinzaine de septembre, grâce aux gains de change, mais elle a perdu en performance relative, les marchés ayant été affolés par une résurgence de la pandémie de Covid-19.

« Nous continuons de privilégier l’Asie du Nord, devant l’Europe, et préconisons des achats sélectifs dans les titres "value" de qualité supérieure »

Nous continuons de privilégier l’Asie du Nord, devant l’Europe, et préconisons des achats sélectifs dans les titres « value » de qualité supérieure. Nous apprécions également le thème de la durabilité. Même si nous reconnaissons que les bruits de marché sont nombreux, nous ne voyons pas de nouvelles données pertinentes nous permettant d’aboutir à une autre conclusion. La question est donc de savoir ce qui importe le plus actuellement pour nos décisions d’investissement, et ce qui importe moins (ou pas du tout). 

Le vaccin n’est pas la seule réponse

Je constate que les perspectives de marché deviennent plus sombres, ce qui a notamment pesé sur la performance des valeurs européennes. Après le choc initial, les données macroéconomiques du troisième trimestre ont créé la surprise par rapport aux attentes très pessimistes. À présent, le marché redoute que la reprise ne s’essouffle et que les bonnes surprises soient déjà passées. Mais il est possible que ces craintes soient exagérées.

Je ne pense pas que les mesures de reconfinement stopperont la reprise, car cette deuxième vague semble moins grave que la première, du moins en Europe. Il est vrai que le nombre de cas de Covid-19 a sensiblement augmenté, mais cela est très probablement dû à l’augmentation des tests réalisés. Les taux de mortalité ont nettement baissé car les personnes vulnérables, les personnels soignants et les gouvernements savent mieux comment soigner la maladie.

De plus, le nombre de traitements efficaces est en augmentation : deux ont d’ores et déjà été autorisés (le dexaméthasone et le remdesivir), deux autres sont disponibles et autorisés pour d’autres indications mais pas encore pour le coronavirus (le tocilizumab et le baricitinib), et deux autres encore devraient bientôt être approuvés (dont le cocktail d’anticorps de la société Regeneron, qui a été administré au président Trump).

Par conséquent, savoir si un vaccin sera disponible en mars, en avril ou en mai ne me préoccupe pas outre mesure en tant qu’investisseur (mais évidemment que oui en tant que citoyenne). En revanche, je m’inquiète des effets à long terme de la pandémie sur certaines entreprises. Les premières mesures de soutien public aux entreprises et aux travailleurs touchent à leur fin, et les nouveaux plans d’aide – même s’ils sont approuvés – seront probablement moins généreux.

Sur le front de l’emploi, certains signes de fléchissement sont d’ores et déjà visibles aux États-Unis, où les chiffres du chômage montrent que les entreprises ont continué de récréer les emplois supprimés pendant la pandémie, mais à un rythme deux fois moins rapide que durant l’été. Des plans de licenciements commencent également à être annoncés par de grandes entreprises. Dans le même temps, les revenus des ménages américains ont baissé en août, en grande partie à cause de la fin de certaines aides aux chômeurs. Il est clair que le plan de relance très discuté aux États-Unis contribuerait à soulager les consommateurs et à soutenir l’économie jusqu’à ce que la dynamique soit relancée. C’est la raison pour laquelle je pense qu’un retard prolongé dans l’approbation d’un plan de relance serait source d’inquiétude pour la demande domestique.

Les élections américaines influencent davantage la sélection de valeurs que l’évolution des marchés

On entend beaucoup parler de la possibilité d’une élection contestée aux États-Unis, mais je suis plus préoccupée par ce qui se passera au Congrès. De toute évidence, un scrutin contesté bouleverserait les marchés à court terme. Toutefois, un vainqueur finira bien par être élu, et quel qu’il soit, il est très probable que les marchés pousseront un soupir de soulagement.

Le futur président tentera de mettre en œuvre des mesures de relance pour l’économie. En cas de victoire de Joe Biden, l’investissement public sera probablement privilégié et l’environnement davantage pris en compte. Ce qui influencera la sélection de valeurs. En revanche, un Congrès divisé rendrait toute politique de relance plus difficile à mettre en œuvre et – de fait – moins efficace. À choisir, je préfère une élection contestée qu’un Congrès divisé.

Tous les marchés ne sont pas bien valorisés, et d’autres options existent

En tant que gérante de portefeuille formée à l’école de la valorisation, je comprends les investisseurs préoccupés par les valorisations et la probabilité que celles-ci aient dépassé les fondamentaux dans certains cas. Pourtant, la polarisation actuelle des marchés signifie qu’ils n’ont pas tous atteint des niveaux de performance et de valorisation extraordinaires, ce qui est certainement le cas aussi des titres. Ces dix dernières années, le Nasdaq Composite a surperformé les plus grands marchés actions du monde, suivi par le S&P 500. D’autres marchés ont largement sous-performé.

Les valorisations relatives sont également bien plus raisonnables que celle du marché américain (actuellement de 21x le PER de l’exercice 2020), la Chine et son indice CSI 300 se négociant à 16,7x le PER de l’exercice 2020 et l’Europe à 16x. Il va sans dire que la croissance des résultats sera le véritable facteur discriminant, et c’est ce que nous devons continuer de surveiller. À ce jour, les différences entre les prévisions de croissance des résultats aux États-Unis, en Europe et en Asie du Nord ne présagent pas une telle disparité entre les valorisations.

Des inquiétudes qui s’apaisent

Notre scénario de base demeure celui d’une économie mondiale qui continuera de s’améliorer, mais plus lentement qu’au troisième trimestre. Les politiques monétaires continueront de soutenir la relance économique, tandis que les politiques budgétaires, malgré quelques rebondissements occasionnels, joueront également un rôle 

de soutien. Dans l’ensemble, cela favorisera les actions mondiales, en particulier si le rendement des bénéfices résultant des valorisations actuelles reste intéressant dans le contexte de faibles taux d’intérêt.

Donc oui, nous avons atteint une zone de vents contraires. Mais on s’y attendait. Alors qu’une deuxième vague de Covid-19 ne constitue pas le meilleur des scénarios, elle ne signifie pas non plus la fin de la reprise économique.

Élément important, nos sources d’inquiétude sont sur le point de disparaître, qu’il s’agisse des élections américaines, d’un vaccin anti-coronavirus ou de la mise sur le marché de nouveaux traitements. Même le Brexit, bien que toujours flou, peut être circonscrit à quelques scénarios (peu optimistes, il est vrai). Cela ne signifie pas que tout va être facile à partir de maintenant, mais simplement que le pire est passé, ou que nos voiles se regonflent.

Nos équipes d’investissement ont continué de prendre quelques bénéfices ciblés sur des titres aux valorisations élevées, et renforcé leurs positions sur les valeurs sous-performantes de qualité qui devraient tirer parti de la reprise dans certains secteurs de l’économie (mais pas tous).

Pour toutes les équipes qui naviguent dans les eaux troubles des incertitudes macroéconomiques, la sélection de titres a permis de conserver le cap. Certaines valeurs auront besoin de plus de temps pour se remettre des effets post-Covid-19 (si tant est qu’elles s’en remettent un jour), et les éviter reste préférable tant que nous n’aurons pas plus de visibilité sur ce que l’avenir nous réserve. Dans un marché volatil très influencé par l’actualité, la patience et la sélection de nos points d’entrée sont et ont toujours été nos mots d’ordre. Les valeurs technologiques restent surpondérées dans de nombreux portefeuilles. C’est également le cas du secteur technologique américain, bien que nous soyons en train d’alléger cette position.

L’Asie du Nord et l’Europe restent nos principales surpondérations dans nos portefeuilles mondiaux. Sur les marchés émergents, nous sommes également sélectifs au niveau des pays, et alors que nous avons continué d’accroître nos positions en Chine, à Taïwan et en Corée du Sud, nous restons prudents en Amérique latine et dans les économies de la zone EMEA.

Compte tenu des nombreuses directions qui s’offrent à nous actuellement, il est important de maintenir le bon cap pour faire la différence en matière de performance d’investissement. 

Fabiana Fedeli, Global Head of Fundamental Equities


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À propos de Robeco Robeco est un spécialiste international de la gestion d'actifs. L'entreprise fondée en 1929 est basée à Rotterdam, aux Pays-Bas, et compte 17 bureaux dans le monde entier. Leader mondial de l'investissement durable depuis 1995, son intégration unique de recherches durables, fondamentales et quantitatives lui permet d'offrir aux investisseurs institutionnels et privés une vaste gamme de stratégies d'investissement actives, couvrant un large éventail de classes d'actifs. Au 30 6 2020, Robeco avait un encours sous gestion de 155 milliards d'euros, dont 144 milliards d'euros intégrant les critères ESG. Robeco est une filiale d'ORIX Corporation Europe N.V.

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