Après quelques semaines d’absence, nous vous retrouvons en cette mi-janvier pour un premier hebdo 2021.

Tout d’abord, nous vous proposerons un résumé de la présentation de perspectives obligataires que nous avons tenue le 14 janvier.

Dans une deuxième partie, nous reviendrons sur un évènement marquant de la semaine concernant le loueur Europcar dont nous avons déjà parlé à maintes reprises dans nos hebdos et qui défraye encore la chronique ces derniers jours, à son insu cette fois.

Enfin nous vous dresserons un bref aperçu du positionnement de nos trois fonds et de leurs rendements à maturité, à l’orée de cette nouvelle année : de 1% sur le fonds de trésorerie à plus de 4% sur le fonds Octo Crédit Value.

1/ Perspectives obligataires et positionnement

Après une année 2020 plus qu’agitée, les marchés obligataires entament 2021 avec des taux historiquement bas puisque 70% du marché européen « offre » aux investisseurs des rendements négatifs… Dans ce contexte, il est nécessaire, pour espérer une rémunération positive de ses investissements, de se positionner en dehors des grands indices obligataires et de trouver des obligations avec des primes de rendement, essentiellement sur le segment corporate « crossover » et « spéculatif », qui n’ont pour le moment pas encore été aspirés par les banques centrales… Mais ça ne saurait tarder !

Une fois ces grandes lignes posées, reste à déterminer quels seront les grands drivers de l’année afin d’affiner son positionnement et surtout sa prise de risque :

a/ Les banques centrales : elles resteront la première force en présence et les plus grands acheteurs obligataires du marché mondial avec des montants proches de 100 milliards par mois, exerçant une force de compression massive sur les spreads et les rendements. Voici à titre d’illustration un graphique représentant les émissions souveraines nettes des remboursements à maturité et des achats BCE. Le solde est négatif de près de 400 milliards d’euros, un record depuis l’avènement des « quantitative easing », qui montre bien que les investisseurs devront payer plus cher… Et donc avoir moins de rendement…

Au sujet des banques centrales, nous noterons également : l’extension des programmes aux portes de la catégorie spéculative avec l’inclusion des « Fallen Angels » (titres BB+/BB) qui devrait contribuer à resserrer l’écart entre BBB et BB, l’extension aux titres bancaires les plus seniors afin d’élargir un gisement qui devient trop limité par rapport à la taille des programmes et l’introduction du terme de « Yield Curve Control » (contrôle de la courbe des taux) permettant aux investisseurs obligataires de dormir tranquille en ayant la quasi certitude que la probabilité d’une hausse des taux significative est quasi nulle … La raison essentielle de ce pilotage programmé des taux est que les montants de dette contractés ces derniers mois par les Etats nécessitent des taux bas pour éviter des intérêts d’emprunts intenables dans les budgets… Comme nous le disions dans des hebdos passés, les taux d’intérêts deviennent systémiques et le moindre dérapage causerait un emballement létal. Banques centrales et Etat doivent travailler main dans la main, faisant fi de l’indépendance qui était la norme il y a quelques décennies.

b/ L’inflation : on a vu pléthore d’articles récemment s’inquiétant d’un retour en force de l’inflation, causée par les injections de liquidités des banques centrales et les programmes d’assistance à l’économie des Etats. Nous considérons que cette inquiétude n’a pas lieu d’être et que les tendances des quelques années passées, axées sur la déflation des biens de consommation et la hausse du prix des actifs, va au contraire continuer.

 

  • Premièrement, les injections de liquidités servent justement à contrecarrer des forces déflationnistes majeures, que la crise sanitaire a encore exacerbées, en particulier en Europe : chômage, baisse de la consommation, confiance basse … Alors que la BCE a instauré des taux négatifs, l’argent a pourtant continué d’être accumulé plus qu’investi et consommé, ce qui montre bien l’absence totale de regain potentiel d’inflation…
  • Deuxièmement, il faut bien aujourd’hui distinguer l’inflation de type « CPI » (inflation à la consommation) et inflation des actifs, que nous avons effectivement tous constaté (actions, obligations, immobilier, …) mais qui fait plutôt baisser les rendements tandis que la première les ferait grimper…
  • L’introduction du terme de « Yield curve control » par les banques centrales suggère qu’une potentielle reprise d’inflation ne signifierait pas forcément hausse des taux : en effet les banques centrales sont conscientes que les budgets des Etats ne le supporteraient pas.
  • Les courbes sur des périodes longues de 5 à 10 ans vous indiqueront plutôt clairement un simple micro rebond de retour à la normale dans une tendance désinflationniste (baisse de l’inflation) que de réels rebonds d’inflation comme en témoigne ce graphe de l’inflation anticipée aux USA, zone qui a suscité le plus d’inquiétude récemment.
  • Enfin, il ne faut pas confondre rebond d’inflation et rebond de l’anticipation du marché de l’inflation future. En effet, les rebonds constatés concernent plus les anticipations d’inflation par le marché et correspondent exactement au sentiment d’optimisme des investisseurs, mais en aucun cas la réalité… Le point mort d’inflation est une sorte d’actif virtuel comme le Vix ou certains « futures » sur matières premières (on se souviendra du prix négatif du future pétrole !!)

 

c/ L’évolution du risque de crédit :

 

  • Si le risque de crédit global en absolu a forcément augmenté ces derniers mois, le risque pour un investisseur relativement aux forces en présence et aux évolutions a plutôt diminué : le risque est connu depuis plusieurs mois, permettant donc à un gérant flexible de s’en extraire en évitant les secteurs en crise comme le tourisme, la mode, l’immobilier de bureaux…
  • Les entreprises, qui ont vu pour la plupart des réductions d’activité, ont eu des soutiens externes majeurs qui leur ont permis, en face de l’augmentation des leviers, d’augmenter aussi leur trésorerie pour absorber ces quelques mois difficiles. Attention, nous parlons ici du marché obligataire corporate, réservé aux grandes entreprises, les TPE/PME auront elles beaucoup plus de difficultés car un accès au financement plus complexe et moins important.
  • Attention aux retraitements comptables de certaines entreprises qui souhaitent embellir des comptes qu’ils jugeraient trop inquiétants pour les investisseurs. Ces opérations sont fréquentes en période de crise.
  • Le risque de crédit peut aussi se matérialiser par des baisses de rating et notamment par des passages de la catégorie ‘haute qualité’ vers la catégorie ‘spéculative ‘, avec les fameux ‘Fallen Angels’. Nous noterons que les injections de liquidités, la recherche de rendement, la globalité de cette crise et la connaissance en amont des secteurs et entreprises concernées ont permis de limiter considérablement les pertes pour les investisseurs sur ce type de dégradation de rating, comme en témoigne le graphe ci-dessous.
  • Nous éviterons cependant les émetteurs qui pourraient être concernés en 2021, ne souhaitant tout de même pas tenter le diable et réservant nos investissements sur les entreprises les meilleures. Nous éviterons donc par exemple : Hammerson, Unibail, Citycon, Easyjet, Solvay, Bayer sub, JCDecaux…

 

En conclusion, voici un aperçu de notre positionnement. Nous restons à votre disposition pour approfondir :

 

  • Un positionnement crédit fort, axé sur la compression des primes de risques entre la catégorie spéculative, en particulier BB, et la catégorie BBB, seule éligible jusqu’à présent au ‘portefeuille BCE’.
  • Des scenarios de décotes diversifiés entre :
    • high yields subordonnés par rapport aux seniors,
    • normalisation des émergents qui accusent encore un retard,
    • situations spéciales,
    • titres bancaires ‘Legacy Tier 1’,
    • consolidation du secteur bancaire en Espagne et en Italie,…
  • Quelques titres investment grade à décote de minimum 80/100bps pour stabiliser le portefeuille et capter du portage.
  • Quelques positions de « carry/roll down » ou de valeur relative sur des souverains au taux encore positifs : Italie, USA, émergents
  • Une couverture flexible sur les indices crédit, les taux et le change

 

2/ Le défaut d'Europcar

Fin 2020, l’entreprise Europcar, acculée par une combinaison mortifère de surendettement, investissements hasardeux, management peu efficace et situation économique mondiale désastreuse, a dû se résoudre au défaut.

Comme d’accoutumée, certains investisseurs avaient souscrit à des assurances pour se prémunir de ce potentiel défaut ou simplement pour spéculer sur la faillite de l’émetteur : les fameux CDS.

Le principe d’un CDS est, en théorie, assez simple : l’investisseur paie une prime régulière et est indemnisé en cas de survenue du risque assuré, à savoir le défaut de l’entreprise.

Durant la durée de vie du dérivé, le niveau de la prime évolue en fonction des probabilités de défaut de l’entreprise, suivant à peu près les mêmes tendances que la prime de crédit sur les obligations du même émetteur.

Dans le cas présent, le défaut d’Europcar sur ses obligations a été établi fin 2020. Les CDS ont donc été déclenchés et les parties prenantes devaient, cette semaine, procéder au règlement des indemnités pour les assurés.

Et c’est justement dans le principe d’élaboration du montant de l’indemnité qu'a eu lieu le problème. Dans une assurance classique, l’assuré envoie une facture de ses réparations de dommages et est remboursé par son assureur. Dans les CDS, outil de marchés financiers par excellence, c’est encore le marché qui détermine le montant du remboursement, par un principe d’enchères sur les titres obligataires initialement assurés.

Ce principe d’enchères peut créer trois biais majeurs :

a/ Le biais du conflit d’intérêt si les market makers de CDS sont aussi les assureurs et les market makers des obligations ou si un acteur crée un effet rareté sur l’ensemble du gisement pour influer sur l’enchère. Ce fut le cas lors de la faillite de Sears avec le fonds Cyrus.

b/ Le biais de la spéculation. Il peut arriver que de nombreux intervenants souhaitent spéculer sur la faillite d’une entreprise et acquérir des CDS sans pour autant détenir les obligations de l’émetteur en face. Comme sur tous les autres produits dérivés, le marché peut donc se retrouver avec un montant de dérivés bien supérieur à l’encours de dette réel de l’entreprise. En cas de défaut, les assureurs placent des enchères sur les titres en défaut mais vu que le montant des dérivés est supérieur à l’encours réellement existant, le prix des titres est leveragé d’autant in fine.

c/ Le biais des obligations interdites de transactions. Dans de nombreuses restructurations, les émetteurs demandent aux porteurs, parfois en échange d’un traitement plus favorable, de bloquer leurs titres afin de faciliter l’opération juridique ou judiciaire. C’est ce qui s’est produit sur Europcar. Ainsi, plus de 1 milliard d’obligations Europcar étaient, depuis plusieurs semaines, interdites de transactions, ne pouvant donc pas être inclues dans les enchères pour le réglement des CDS. Ainsi, alors que les CDS représentaient seulement une centaine de millions d’euros, poussant les investisseurs à penser que ce montant limité permettrait une indemnisation correcte, ils se sont finalement retrouvés avec une indemnisation nulle.

En effet, les enchères, portant sur un montant famélique d’obligations et de prêts (un prêt de 50M€, acquis par King Street en octobre avait lui aussi été bloqué aux transactions), ont tiré le prix unitaire de chaque obligation au maximum, c’est-à-dire à 100%, alors même que chacun sait que ce n’est pas ce qu’elles vaudraient dans la réalité…

Voici donc une nouvelle déconvenue pour le marché des CDS qui peinent décidément à couvrir correctement les obligations et servent plus, comme beaucoup d’autres dérivés, à la spéculation du quotidien de quelques traders qu’à assurer réellement les investisseurs obligataires. Entre le cas Europcar, les cas de non déclenchement de l’évènement de crédit car l’émetteur ou les assureurs se sont arrangés avec le contrat (Affaire Radioshak), les cas d’exclusion pour changement de périmètre, les effets de squeeze sur le marché secondaire qui créent des distorsions de primes entre le marché cash et le marché dérivé, les évolutions de primes parfois contraires car les intervenants ne sont pas les mêmes entre argent réellement investi et spéculation (comme ce fut le cas une bonne partie de l’année 2020 qui voyait les primes de CDS s’écarter et les obligations se renchérir au gré des liquidités arrivant continuellement sur le marché), nous considérons encore que les meilleures couvertures sur le marché du crédit restent les futures sur indices obligataires crédit, rares mais plus efficaces, les TRS sur des obligations précises ou des paniers d’obligations, ou plus simplement la cession des titres. Dans le cas Europcar, le différentiel entre une cession et la confiance dans le CDS était tout de même de plus de 25 points sur le nominal initial de 100 !

3/ Résumé des fonds Octo

Pour terminer et revenir à des considérations d’investissements concrets et de l’économie réelle, vous trouverez ci-dessous les grandes lignes de nos trois fonds, l’un pour le placement de trésorerie, les autres pour une gestion obligataire plus long terme. Toute l’équipe Octo reste à votre disposition pour en approfondir les stratégies ou discuter avec vous des meilleures opportunités obligataires en fonction de vos objectifs d’investissement, et vous souhaite une très belle année 2021 !

 

Pour accéder à l'intégralité du texte (et visionner les graphiques), cliquez ICI.

 

 

A Propos d’Octo AM
Créée en 2011 à l’initiative d’Octo Finances et adossée au groupe Amplegest depuis 2018, Octo AM est spécialiste de la gestion obligataire ‘value’. S’adressant essentiellement aux investisseurs professionnels, qu’ils soient institutionnels ou patrimoniaux, Octo AM décline sa gestion au travers de fonds ouverts, fonds dédiés ou mandats avec un objectif permanent : rechercher les obligations offrant, selon le gérant, un rendement supérieur à son risque de crédit sur un horizon donné.
dnca sommes nous a la veille d'un changement de cycle ? 

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