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Historiquement la finance s’est principalement focalisée sur les produits financiers, en délaissant les investisseurs : il n’y a pas de « Quant » des investisseurs ! La profession devrait remédier à cette situation et utiliser les informations sur les choix passés, mais aussi sur les décisions prises dans le cadre de scénarii afin de mieux accompagner l’investisseur dans ses décisions.

Les modèles de choix discrets peuvent l’y aider.

Daniel McFadden(1) a reçu en 2000 le prix Nobel d’économie pour ses études en économétrie sur les comportements de choix(2) et sur l’utilisation des données individuelles. Nous analysons ici les implications de ces modèles pour le conseil en investissement.

Le choix entre un actif risqué et un actif certain, entre un portefeuille ayant un rendement et une volatilité élevés, ou un autre plus prudent, constitue un choix discret (binaire) qui dépend d’une multitude de facteurs, observables ou non. Ces choix s’expliquent par l’aversion au risque de l’investisseur. Ce terme fourre-tout abrite une grande complexité. Il inclut a) la situation économique(3) ; b) la situation familiale, l’âge, le revenu et leur stabilité qui constituent d’autres facteurs primordiaux dans ces choix. Cette complexité reflète le fait que la prise de risque dépend de facteurs multidimensionnels (aversion au risque versus aversion aux pertes), qui nécessitent, pour être mesurés, le recours à des techniques économétriques mobilisés par les modèles de choix discrets.

Les modèles de choix discret ne réalisent pas un simple calcul comptable (fastidieux et infaisable) basé sur des facteurs économiques. Ils vont plus loin en expliquant d’un point de vue comportemental ces dépendances et relations en tenant compte des biais de perception et des  erreurs éventuelles. Cette approche, axée sur les préférences et  les comportements des investisseurs permet de tracer une véritable carte d’identité de ces derniers.

Le modèle de choix discret remplace avantageusement cet apprentissage individuel en traitant de manière globale les données de milliers d’investisseurs.  

Comme un système expert qui acquiert les connaissances des experts, les modèles de choix discrets recensent et expliquent les expériences passées : l’analyse et les enseignements obtenus en étudiant le global est ensuite retraduit au niveau individuel pour accompagner le conseiller et son client dans les choix d’investissement.

Cette approche mutualise leurs expériences individuelles. Cette nouvelle forme d’intelligence collective, basée sur l’analyse statistique et économétrique, s’appuie sur l’analyse de grandes bases de données relatives aux comportements observés et hypothétiques des investisseurs.

Par conséquent, la clé est d’exploiter les complémentarités entre le conseiller en investissement et les recommandations fournies par des outils d’aide à la décision alimentés par les modèles de choix discrets. A l’heure actuelle, cette approche n’est pas le Graal du conseil en investissement, mais elle s’en rapproche.

André de Palma est professeur d'économie à l'ENS Cachan et directeur scientifique de RiskDesign. Nathalie Picard est maître de conférence à l'Université Cergy-Pontoise.

Voir aussi

1) Page Daniel MacFadden

2) Article concernant Daniel MacFadden

3) Les conséquences de la crise des subprimes auraient été moins sévères si certains conseillers avaient disposé d’outils fiables pour mieux mesurer la situation économique des emprunteurs et les implications en termes de prise de risque.